De l’occasion et de la fortune
France?, ca. 1580
"De l’occasion et de la fortune." In Pensées politiques
Chicago, Newberry Library, VAULT Case MS 5228
[Paragraph 269]
Il se trouve des hommes si espris de leur propre suffisance, que s’ilz oyent dire que la fortune ayt | quelque authorité sur les affaires humaines, ilz s’en moquent. Et y en a d’autres, si deffians d’eus mesmes, ou par | lacheté de courage ou pour en voir une infinité de peu de merite estre bien fortunés, qu’ilz tiennent l’industrie | de l’homme innutile et vaine, et que tout deppend d’une bonne ou mauvaise fortune. Mais encores qu’on | peut aysemment monstrer la fauseté qui est ces deus oppinions, toutesfois, ayant à faillir, il vaut | mieus suivre les premiers pource qu’ilz sont tousjours industrieux et diligentz, et qu’aux mauvais succés | ilz redoublent leur diligence et industrie, comme ceus qui pensent que leur perte arrive par leur indiscretion | ou insuffisance, et non de la fortune. De sorte qu’encores que ceus cy ne parviennent à ce qu’ilz desirent, ilz s’y | sont au moins efforcés comme hommes courageux. Outre que celuy qui a l’industrie n’a plus à attandre | que la venue de la fortune, pource qu’estant arrivee, il sçait le moyen de la gouverner; là où celuy qui | n’est industrieus est constraint non seulement de l’attandre, ains aussi qu’estant venue elle face seule | toutes choses pour luy. Et encores qu’elle feit que les choses fortuites peussent bien reuscir (ce qui | avienda fort rarement), outre que c’est sans louange de celuy qu’elle favorise, c’est un dangereus | example pour le public, à qui elle peut faire perdre l’industrie. ||
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